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Lucas Bielli, psychanalyste à Montpellier et Guylène Dubois, psychanalyste à Sète animent la chronique hebdomadaire Radio divan, pour une psychanalyse populaire. Deux voix pour explorer un sujet psy.
Musique d’introduction : Henri Salvador, né le 18 juillet 1917 à Cayenne (Guyane) et mort le 13 février 2008 à Paris 1er, est un auteur, compositeur, interprète et chanteur de charme, humoriste et musicien français. Dont le succès démarre en 1947. Cette chanson surréaliste I date de 1948 et sort en 78 tours.
En 2024, le surréalisme fête ses 100 ans. En Belgique, deux expositions fêtent cette naissance. L’une au Palais des beaux-arts, le Bozar qui propose un panorama du surréalisme intitulé Histoire de ne pas rire et la seconde Imagine! dans les Musées royaux des beaux-arts de Belgique propose “une immersion dans la poésie surréaliste, à travers les thématiques du rêve, du labyrinthe, de la métamorphose, de l’inconnu et du subconscient, emmenée par les grands noms du surréalisme, de Max Ernst à Giorgio de Chirico”.
C’est en 1924 qu’André Breton, dans son Manifeste du surréalisme, définit cette expression artistique comme “automatisme psychique pur par lequel on se propose d’exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée, en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale ».
Le surréalisme et l’inconscient
C’est en 1916 qu’André Breton découvre les théories freudiennes. L’artiste rend visite au psychanalyste en 1921 à Vienne. Cette connaissance de la psychanalyse naissante aura une grande influence sur l’écriture automatique prônée par les écrivains de ce mouvement. Ceux-ci vont en effet avoir recours aux récits oniriques, à l’association libre des images provoquées. André Breton dans son Second Manifeste (1930) cite Freud dans ses Cinq leçons sur la psychanalyse (1909) « L’homme énergique et qui réussit, c’est celui qui parvient à transmuer en réalités les fantaisies du désir. Quand cette transmutation échoue par la faute des circonstances extérieures et de la faiblesse de l’individu, celui-ci se détourne du réel : il se retire dans l’univers plus heureux de son rêve. En cas de maladie, il en transforme le contenu en symptômes. Dans certaines conditions favorables, il peut encore trouver un autre moyen de passer de ses fantaisies à la réalité […]. S’il possède le don artistique, psychologiquement si mystérieux, il peut, au lieu de symptômes, transformer ses rêves en créations artistiques. Ainsi échappe-t-il au destin de la névrose et trouve-t-il par ce détour un rapport avec la réalité.”
Toutefois, même si aujourd’hui nous retenons des artistes peintres comme représentants du surréalisme, Freud se sentait plus proche du travail des écrivains, qui manient la langue et les mots. Comme Arthur Schnitzler et Stefan Zweig. Même si ceux-là ne sont pas considérés comme surréalistes, ils font partie de l’intelligentsia viennoise contemporaine de Freud.
Aujourd’hui, parmi les écrivains proches du mouvement surréaliste, nous pourrions citer Robert Desnos, mort du typhus en 1945, Antonin Artaud, mort en 1948, René Char (1907-1988), Julien Gracq, mort en 2007, Philippe Soupault, mort en 1990 ou encore Federico Garcia Lorca en Espagne et bien d’autres encore. Le mouvement surréaliste proclame sa date de fin en 1919, même si aujourd’hui encore le surréalisme se manifeste particulièrement dans la photographie, la peinture et la sculpture. En littérature, l’Oulipo, l’Ouvroir de littérature potentiel créée en 1960, est historiquement associé au surréalisme. Pour les écrivains de ce mouvement, le hasard est radicalement rejeté: « Nous lançons un défi au hasard » (Claude Berge) ; « La structure doit être cohérente. […] La structure a pour effet d’endiguer le hasard » (Jacques Duchateau)… l’invention littéraire est mathématisée, servant de maîtrise à l’écriture. Parmi ces auteurs de l’Oulipo citons Georges Perec.
Guylène Dubois