Là, tu casses les lignes !
Jeanne Claret (Audrey Dana), mère de deux enfants, architecte, apprend son divorce de façon brutale par son mari. Un soir d'orage, un pénis lui surgit. Jeanne, d'abord contre son gré, se complaît peu à peu dans une identité masculine jusqu'au jour où elle tombe amoureuse de Merlin (Eric Elmosnino)
Dans la sélection officiel du Festival de l'Alpe d'Huez 2017, Si j'étais un homme est avant tout une comédie. Et l'effarement d'Audrey Dana face à cet appendice nouveau donne lieu à de nombreuses scènes drôles et réussies. Au-delà de cet humour de premier plan, se glisse de manière pertinente et évolutive tout le long du film un le regard de la réalisatrice sur la partition que jouent les femmes et les hommes dans leur quotidien. Marcelle (Alice Belaïdi), la voisine de palier de Jeanne, ne manque pas de s'extasier devant cette extra-terrestre qui présente de nombreux atouts : enfin, une femme va pouvoir ressentir ce qu'un homme ressent, sexuellement, socialement, émotionnellement. Mais cet enthousiasme laisse place à une peur, présente dès le départ chez Jeanne et qui va atteindre Marcelle, à l'esprit ouvert. Quel est ce nouvel individu représenté par Jeanne/Jean, muni d'un cerveau de femme et d'un sexe d'homme, et dont les hormones sexuelles, côté fille ou côté garçon sont aussi actives qu'au moment de l'adolescence. Qui réagit, quand et à quoi, Jeanne ou Jean ? Après ces recherches identitaires apparaît une réflexion sur la représentation de l'homme et de la femme dans la société française : un homme qui conserve, en cas de divorce la garde des enfants est encore rare, un homme aimant et dorlottant ses enfants est considéré comme suspect dans le monde du travail ; une femme, cheffe de service ou cheffe de chantier ne bénéficie pas de la même approbation de son entourage. Audrey Dana fustige les clichés de genre et montre qu'il ne s'agit pas de valoriser la place de la femme ou de l'homme, mais de respecter l'individu et sa démarche personnelle. Le monde change, comme le dessine un peintre sur l'un des murs de l'école construite par Jeanne. Changeons avec lui, enlevons nos oeillères et considérons que nous avons tous à nous serrer les coudes pour vivre ensemble nos différences. Le message est bienveillant et Jeanne va perdre son attribut masculin. Tout est bien qui finit bien. Pourquoi Audrey Dana n'a-t-elle pas accepter que Jeanne garde son sexe d'homme ? Trop difficile de franchir ces frontières identitaires ? de casser les lignes ? La scène finale nous réserve toutefois une belle surprise.
Si j'étais un homme…/ d'Audrey Dana ; avec Audrey Dana, Eric Elmosnino, Christian Clavier, Alice Belaïdi. 2017. Comédie. Distribution : Wild bunch distribution.